
Sous le lierre sauvage, un morceau d’Histoire. Lorsqu’ils rachètent en 2020 une maison à Dreslincourt, quartier du goût fin, Clément et Aurélie Groscaux, ne savent pas encore dans quelle aventure ils viennent de se lancer. «Accolé à la maison, il y avait un bâtiment, on pensait que c’était comme une grange», raconte Clément. Livrée à l’abandon, la «grange» va finalement livrer son secret bien vite. «On a commencé à la nettoyer et on a rapidement eu des doutes. On a fait des photos et on les a montrés à des gens qui sont passionnés d’Histoire et ils ont été formels».
Lui-même passionné de la Seconde Guerre mondiale
Le hasard a voulu que Clément soit en effet membre de l’association Lib 44 de Noyon. Ce regroupement de passionnés qui œuvre notamment à l’animation de la ville chaque mois de septembre pour fêter la libération de Noyon de l’occupation nazie, comporte son lot de passionnés de la Première Guerre mondiale également. Le verdict est tombé : «On nous a bien confirmé qu’il s’agissait d’un baraquement Adrian.»
Ces baraquements, dénommés d’après le nom de Louis Adrian, ingénieur militaire ont d’abord été utilisées pendant le conflit. Ces espaces préfabriqués servaient de casernement, pour l’entreposage, d’atelier. Il a aussi été utilisé lors de la reconstruction pour improviser des habitats avec du matériau de récupération pas cher. «100 ans plus tard, elle est toujours debout», s’enthousiasme-t-il, attablé dans la baraque fraîchement rénovée. Car avec Aurélie, il a passé le plus clair de son temps libre ces dernières années à faire du lieu un gîte qu’il s’apprête à mettre en location pour des séjours insolites et historiques.
«Quand on a enlevé le lierre, on a vu le travail qu’il y avait : il y avait des trous partout, c’était vraiment très dégradé par endroit, parfois, pendant le chantier, on a eu envie de renoncer, j’ai dû le pousser un peu», en rigole Aurélie. Préposé aux travaux, Clément n’a pas chômé. Il a fallu d’abord décaper le plus gros. Se débarrasser notamment d’un arbre qui poussait au beau milieu de la baraque. Puis méthodiquement il a retiré les lattes de bois composant les murs, posé des cadres pour accueillir l’isolant, poncé les planches, reposé les planches dedans et dehors, et complété avec un bois aux teintes proches lorsqu’il est arrivé à court de matériaux d’origine. Un gros travail a dû également être mené pour la mise en conformité électrique évidemment, et l’ajout de réseaux sanitaires.
Le petit lieu cosy a été voulu comme un hommage à l’histoire de ces baraques Adrian. «On a chiné en ligne ou sur les brocantes pour proposer un petit retour dans le temps à ceux qui viendront y séjourner», explique le couple. Au milieu de la table trône par exemple un vase fait à partir d’un obus. «Ce qu’on appelle de l’artisanat de tranchée.» Au mur, une peinture faite par un proche de Clément et montrant une carte des positions françaises et allemandes pendant le premier conflit à Ribécourt-Dreslincourt, avec, au centre, un point indiquant la baraque et la mention ”Vous êtes ici”, comme sur les plans touristiques. Au mur aussi, un casque Adrian (toujours d’après le même ingénieur militaire), rappelle aux visiteurs l’histoire des lieux. «Mais ce n’est pas un musée, on a chiné des objets bien plus récents. Vieilles armoires, ensemble de toilette rustique (pour la déco) dans la chambre, tout est ”vintage”, comme on dirait aujourd’hui. Les lieux ne sont pas non plus sans confort, un ensemble moderne a été ajouté en cuisine pour se faire à manger avec plaque céramique et micro-ondes. Des télés sont aussi dissimulées dans les meubles, pour offrir le pratique sans pour autant jurer avec l’ambiance des lieux.
Le chantier tout fraîchement achevé, le couple a désormais mis son bien en location. Et donné à son gîte le nom de ”La Germaine”, en hommage à la grand-mère de Clément. Une occasion de passer un séjour dans un lieu peu commun d’une cinquantaine de mètres carrés malgré tout. «Ce sont des baraques qu’on ne voit presque plus, achève le couple, c’est la dernière de Ribécourt et on nous a dit que c’était une des toutes dernières de la région.»
Un gîte qui devrait être ajouté aux programmes touristiques de la Ligne Rouge, parcours touristique autour de la Première Guerre mondiale dans l’Oise.
Gîte La Germaine, rue du Goût fin à Ribécourt-Dreslincourt. Contact : 06 61 44 90 33